Le Professeur Échimane Kouassi Antoine est décédé le lundi 21 juin 2010.
Les condamnations des praticiens ne sont pas exceptionnelles, mais la plupart restent souvent confidentielles.
Avant de confier sa vie à un chirurgien, un citoyen peut-il vérifier que celui-ci n’a pas été condamné ou interdit d’exercice pour de graves fautes médicales ? La question a été soulevée récemment, avec les ennuis de santé de Johnny Hallyday après une intervention pour hernie discale. Certes, la responsabilité de son chirurgien, le Dr Stéphane Delajoux, reste à prouver (une audience est prévue lundi au tribunal de grande instance de Paris pour décider de la réalisation d’une expertise afin de déterminer d’éventuelles responsabilités médicales). On peut toutefois se demander si le chanteur aurait fait appel au « chirurgien des stars » s’il avait connu son passé sulfureux, révélé depuis dans les médias.
D’après notre enquête, accéder aux antécédents judiciaires d’un professionnel de santé relève, pour un citoyen lambda, du parcours du combattant. La situation n’a rien de spécifique au milieu médical. « Je ne connais aucune profession réglementée, médicale ou non, qui publie le “passé judiciaire” de ses membres », remarque Lionel Jacqueminet, avocat spécialisé en droit de la santé (Paris). Selon lui, ce n’est pas choquant. « Ce n’est pas parce qu’on est condamné par l’Ordre des médecins, qu’on est forcément un mauvais praticien. » Justice pénale, civile, ordinale… Les médecins peuvent en effet être poursuivis par diverses instances pour des motifs variés qui n’ont pas forcément à voir avec leurs compétences cliniques.
Selon plusieurs spécialistes, il n’est en tout cas pas exceptionnel qu’un praticien ait plusieurs condamnations à son actif, sans que ses patients en soient informés. En pratique, quelques informations basiques peuvent être obtenues via le Conseil de l’ordre des médecins. « Toute personne peut téléphoner à l’Ordre départemental pour savoir si un praticien est en capacité d’exercer. L’information est aussi en libre accès sur notre site Internet qui est remis à jour quotidiennement », indique le Dr Jackie Ahr, secrétaire général adjoint du Conseil national de l’ordre des médecins (CNOM). Il précise aussi que les audiences des instances ordinales sont publiques et que leurs décisions définitives sont affichées (quelques jours) dans les bureaux des conseils départementaux.
La communication reste toutefois limitée. Un praticien temporairement interdit d’exercice - par décision ordinale ou pénale - ou définitivement radié est effectivement introuvable sur l’annuaire en ligne du CNOM, mais aucune précision n’est apportée quant au motif. Surtout, il est hors de question pour l’Ordre de rendre publiques les autres informations dont il dispose sur les médecins.
Ni auprès des assureurs, ni dans leur casier judiciaire La discrétion est également de mise chez les assureurs en responsabilité civile de ces professionnels, qui ont eux aussi accès à l’ensemble du dossier de leurs clients. Inutile enfin de songer à réclamer leur casier judiciaire. En dehors de la personne concernée, une telle demande ne peut être effectuée que par des administrations, des employeurs ou des associations, selon un avocat.
Le public se sent-il pour autant pénalisé ? Au quotidien, le Conseil de l’ordre se dit moins souvent sollicité sur le passé judiciaire des médecins que sur leur capacité à pratiquer tel ou tel acte. « Je reçois 500 personnes par an, jamais personne n’a soulevé le problème des condamnations, assure aussi Marie Solange Julia, présidente des Aviam (associations d’aide aux victimes d’accidents médicaux). On nous interroge davantage sur la réputation d’un établissement ou les compétences d’un praticien. »
Faudrait-il plutôt miser sur une recherche d’informations positives, attestant des bonnes pratiques d’un médecin ? C’est le sens d’une démarche initiée par la Haute Autorité de santé (HAS) pour accréditer des cliniciens exerçant des spécialités à risque dans des cliniques ou des hôpitaux. En trois ans, près de 4.400 volontaires ont déjà obtenu cette « labellisation », attribuée sur plusieurs critères dont la gestion des risques. « La demande des antécédents de contentieux avait été envisagée, mais il y avait une impossibilité juridique », précise Frédérique Pothier, de l’HAS. La liste de ces praticiens accrédités est publique, mais peu visible sur le site de l’HAS. Source : Sandrine Cabut - Le Figaro, 18 décembre 2009